A ce moment là, toutes leurs productions ne devraient pas être accessibles.
Là c’est l’hameçon pour ferrer le poisson.
EDIT :
Ahhh le voilà sur Le Maine Libre :
Basket. Dounia Issa, coach du MSB, dévoile sa méthode
Le 06 novembre 2019 à 19h46
Devenu coach principal du MSB cet été, Dounia Issa vit pleinement son nouveau rôle. Ses inspirations, son mode de fonctionnement, sa philosophie de jeu, ses premiers ajustements. Il se livre avant un match particulier, ce samedi 9 novembre 2019, contre le Gravelines d’un certain Eric Bartecheky.
Le Maine Libre : Comment s’est dessinée votre envie de devenir coach ?
Dounia Issa : « J’ai toujours eu deux choses dans ma personnalité. Le côté cérébral mais aussi le côté énergie que j’avais sur le terrain. Le jeu, depuis tout jeune, je m’y intéresse. J’aimais bien dessiner des systèmes déjà quand j’étais joueur. C’est peut-être le fait d’arriver sur le tard, j’avais beaucoup de retard à rattraper sur ce point ».
Où avez-vous tiré votre inspiration ?
« J’ai eu la chance d’être initié au jeu par Jean-Aimé Toupane (ndlr : son coach à Clermont de 2001 à 2007), un très bon prof. On a fait beaucoup d’heures de rattrapage. Ça a été un peu la première graine. J’aimais son style, sa façon d’entraîner. C’était très à l’américaine, avec beaucoup de rythme, un niveau d’exigence très haut et c’était un gagnant. Surtout, il traitait tout le monde pareil. J’aimais bien ce côté pas de jeunes, pas de vieux, on exige 100 % de tout le monde. Je rentrais dans le monde pro et ça me parlait. Par la suite, ça m’a fait aussi du bien de voir d’autres façons de coacher et d’être performant. Je suis passé par l’école Jean-Louis Borg (à Vichy), Christian Monschau (Gravelines), JD Jackson et Erman Kunter (au Mans) ».
À quel moment votre décision a été prise ?
« À l’époque de Jean-Aimé Toupane, je ne mettais pas encore de mots dessus, c’était plus du domaine du ressenti. Celui avec qui j’ai commencé à y réfléchir et me dire que j’allais basculer, c’est JD. On échangeait beaucoup, c’est celui qui m’a le plus encouragé dans cette voie. Il me disait « je sens que tu as le potentiel et la manière dont tu réfléchis sur le terrain, c’est ça ». C’est d’ailleurs à ce moment-là que j’ai commencé à passer mes diplômes ».
Etiez-vous un gros consommateur de matchs de basket ?
« C’est arrivé progressivement. Je sors d’une culture très axée basket américain. Au début, je regardais beaucoup la NBA. Et petit à petit, en devenant pro, j’ai commencé à m’intéresser au basket européen. À en saisir les subtilités et me rendre compte que c’était deux sports différents. Et plus j’avançais, plus je me passionnais pour le jeu. Je regardais beaucoup de matchs avec un œil de plus en plus précis, de plus en plus acéré au fur et à mesure que je mûrissais dans mon jeu, dans ma carrière ».
Qu’est ce qui vous a marqué dans ce jeu européen ?
« D’abord, l’intelligence de jeu des joueurs étrangers. Et notamment chez les Grecs. Ils avaient un style tout en contrôle. Aucun joueur athlétique mais des organisations incroyables, un basket très précis, physique, lent, ils savaient où mettre la balle. Je me rappellerai toujours leur victoire contre Team USA (au Mondial 2006). C’était un séisme. Avec Papaloukas, Sofo,… Il y avait une intelligence tactique, une maîtrise de chaque possession, une telle connaissance de leurs forces et leurs faiblesses, j’ai trouvé ça beau. Ce sang froid aussi dans les moments décisifs. Je partageais ça avec des amis, on se régalait. Tous les gamins comme moi qui étaient un peu biberonnés aux États-Unis, ça nous a fait changer de paradigme. On a pris conscience qu’il y avait un autre basket, une autre façon de jouer. Et que le tout athlétique ne gagne pas toujours. Et heureusement, c’est ce qui fait la beauté de notre sport ».
Cela a été dur de faire la bascule vers le banc de touche ?
« Je suis rentré dans le staff avec Erman Kunter. Ça m’a permis de voir de l’intérieur le fonctionnement d’un groupe. Mon cas était un peu particulier. Du fait des blessures (ndlr : deux ruptures des tendons d’Achille en un an), tu es déjà sur le côté, en observation. Finalement, ça a préparé le terrain. Si j’avais été blessé d’un coup et que j’avais basculé, ça aurait été trop dur. Là, il y a eu toute une période de sas, ça m’a aidé à transiter. Au fur et à mesure, tu prends un certain recul. Par la force des choses, comme tu ne peux pas participer physiquement, tu participes cérébralement. Tu deviens presque un assistant coach officieux ».
Et là, on voit vite les choses différemment ?
« Il y a une vraie frontière, oui. Il y a le monde du joueur, centré sur la performance personnelle. Il est dans ses routines quotidiennes, son repos, ses soins, et tout ça vient s’insérer dans un collectif. Le coach, lui, réfléchi tout le temps en termes d’équipe, en termes de connexions. De quoi on a besoin, ou doit-on aller… Ce n’est pas fait pour tout le monde. Il y a des joueurs qui ne pourraient pas pour des raisons de caractère. Le jeu appartient de plus en plus aux joueurs, ils ont de plus en plus de pouvoir dans les clubs. Et le coach devient un facilitateur ou non, mais ce n’est plus la figure indéboulonnable comme par le passé ».
Puisez-vous beaucoup dans ce que vous ont appris vos différents coachs ?
« Je fais une espèce de patchwork pour le coller à ma personnalité, à la manière dont je vois le jeu. J’en fais du Dounia (sourire). C’est le début, ça sera en perpétuelle évolution. Déjà tu dois t’adapter à tes joueurs. C’est ton premier public. Il faut bien l’évaluer, le connaître. Je suis en train de m’en rendre compte. Il ne s’agit pas de faire moins ou plus, mais de faire ce qui correspond à l’équipe. Il faut un pragmatisme. On croit toujours qu’on est le plus malin, qu’on va révolutionner le truc mais non, il faut une approche humble. Certains coachs veulent que les joueurs s’adaptent à leur philosophie, je ne suis pas comme ça. Si certaines choses ne marchent pas, il faut avoir l’humilité de dire, on laisse tomber. L’idéal, c’est de recruter en fonction de sa philosophie mais il y a souvent un décalage. C’est plus complexe que les simples qualités techniques ou physiques du joueur ».
D’où l’idée, cet été, de recruter des têtes connues ?
« Ça me rassurait beaucoup d’avoir des garçons dont je connaissais la fiabilité. Je savais où j’allais. Dans les moments difficiles, je sais qu’ils répondront présents. Pour un jeune entraîneur, c’est un plus d’avoir des gars avec un cœur sain. Tu sais qu’ils feront le max, qu’ils vont essayer. J’en ai connu qui n’étaient pas de ce genre… ».
Concrètement, c’est quoi la méthode, la philosophie du coach Dounia Issa ?
« Le mot qui résume tout, c’est le partage. Je n’aime pas le jeu égoïste. On sait que tous nos joueurs ont des qualités et on va essayer de donner à manger à tout le monde dans le jeu. Mais ce qu’on veut que les mecs comprennent bien, c’est que le partage génère une énergie créatrice des deux côtés de terrain. Si on se passe la balle, qu’on fait des efforts les uns pour les autres, qu’on est généreux, il va se passer quelque chose. On est dans une société individualiste, les joueurs pensent à leur projet, mais on essaye de marteler ça. C’était comme ça quand j’étais joueur. Je ne pensais pas à mes stats mais à ma performance dans un sens d’utilité pour le groupe. Tout ne se voit pas dans les stats. Un joueur performant c’est un joueur avec un niveau d’effort et de concentration élevé, qui peut appliquer les systèmes à la perfection, fais des stops, montre une intelligence de jeu sans avoir forcément marqué ou provoqué des choses. En tant que coach, on voit qu’il n’a pas fait d’erreur. Et c’est ça qui fait aussi que tu vas gagner ».
Vous ne seriez pas du genre à construire une équipe autour d’un joueur « star » ?
« Si, mais tout dépend la star. Les plus grands champions sont dans ce qu’on vient de dire. On les prend souvent pour des égoïstes – et il y en a – mais les très grands ne le sont pas du tout. Ils sont tournés vers le collectif même si leur talent fait que les choses viennent à eux. Parfois, à l’inverse, il y a des joueurs intermédiaires ou moyens qui sont dans un égocentrisme qui parasite l’équipe… Mais le mec qui met le tir, il bénéficie d’un coéquipier qui fait la passe, d’un qui lui fait un écran, d’un autre qui l’a démarqué, d’un coach qui a décidé d’un système. Le panier est l’aboutissement. C’est une façon de voir le jeu aux antipodes de certains coachs. Il faut protéger ça car ce sont aussi des valeurs de société ».
Votre discours aux joueurs dépasse donc le seul niveau purement basket ?
« Pour moi, il y a une notion minimum d’effort, de partage. Jamais je me prendrais la tête avec un joueur en maladresse. Mais un joueur qui gèle la balle, fait des mauvais choix ou n’est pas concentré,… Tout ça ce sont des choses que tu peux contrôler. Je leur dis, si tu respectes le jeu, le jeu te respectera. Ce n’est pas facile car certains, ça les sort de leur zone de confort et ça peut créer du conflit. Maintenant, je ne veux pas avoir un mode d’emploi, j’essaye d’être moi-même. Je n’aime pas gueuler mais parfois, il le faut pour que les joueurs comprennent. Mais si tu le fais tout le temps, le message ne passe plus. C’est un équilibre pour que les gars comprennent ce qui est important ou non, ce qui va ou pas. Je m’en rends compte dans les séances. Les joueurs sont attentifs aux mots choisis par le coach, à son body language… ».
Déléguez-vous beaucoup avec vos adjoints ?
« J’aurais aimé donner beaucoup plus à mes adjoints. Attention, ils font pas mal de choses, mais peut-être moins que ce que j’aurai voulu dans mon projet initial. Simplement, je me suis rendu compte que quand tu es un jeune coach, il faut aussi faire toi-même les choses pour avoir une emprise sur le groupe. Asseoir ton statut. J’ai donc dû revirer un peu mon projet et un peu moins déléguer. C’est aussi dû à l’expérimentation du métier, on va progresser là-dedans ».
Comment vivez-vous la pression, quasi constante, du résultat ?
« C’est pareil. Je veux faire des choses mais je dois aussi tenir compte de la réalité. Et la réalité par exemple, c’est qu’à Bourg, on fait tourner, on fait jouer beaucoup certains joueurs et là, on voit des différences énormes. On a pris l’eau complet. Et c’est aussi de ma faute. Mais j’en tire des enseignements et pour des matchs plus importants, comme Monaco, je ferme un peu la rotation. Aux joueurs de travailler et de m’envoyer les signaux qui me rassurent. C’est la compétition. J’ai connu des coachs, tu fais une erreur, tu sors. Je ne suis pas de ce genre, j’ai une certaine tolérance mais peut-être qu’il ne faudrait pas toujours car tout peut se jouer sur une ou deux possessions ».
Retrouvez dans votre édition print du Maine Libre du jeudi 7 novembre 2019 la Gazette du MSB avec toutes les infos autour du match Le Mans – Gravelines.