Dans la droite ligne de « Père Castor….raconte nous une histoire », je vous propose pour cette saison quelques tranches de vie d’un vieil aficionado manceau.
Sur un rythme d’une « histoire » toutes les 5 ou 6 semaines, j’espère faire remonter à la surface quelques souvenirs ou, pour les plus jeunes, faire découvrir quelques-unes de ces pages « glorieuses » d’un passé qui s’éloigne inexorablement.
C’est aussi un clin d’œil à ces 20 bougies que souffle le MSB cette année ! Clin d’œil marqué par une couleur, une sonorité, un tempo ! Tango !!!
Episode 1 : Salles histoires !
Salle Robert JARRY. Septembre 2013.
Le MSB reçoit en amical (sauf pour ses Espoirs) Orléans.
Au-delà du score (une victoire mancelle…sauf pour ses Espoirs), l’Histoire retiendra surtout que le MSB rentre ainsi officiellement dans « sa » quatrième salle.
Alors pour être précis, ce n’est pas tout à fait exact. Il faut passer outre le fait qu’avant d’être le MSB, le club s’appelait SCM ! Saut dans le temps que les cintres d’Antarès franchissent allègrement. Les bannières qui nous rappellent l’Histoire du basket manceau n’en ont cure et pour nous, les vieux, les nostalgiques, le nom n’a finalement que peu d’importance. Une seule chose compte ! La ville ! La couleur du maillot ! L’engagement, la ferveur des joueurs pour ces couleurs ! Et, par-dessus tout, la communion de ces hommes en tango avec nous qui n’attendons d’eux que le simple bonheur de rêver !
Pour qu’une telle communion puisse prendre corps, il faut qu’il y ait un lieu, une église, une cathédrale, une salle où nos prières de victoires vont s’exaucer !
Gouloumes, la Rotonde, Antarès : 3 salles et combien d’histoires ?
Nous avons tous dans nos mémoires personnelles une once de cette mémoire collective. Nous avons tous une anecdote qui nous revient, un match, un joueur qui nous a plus plu que tel autre. Qu’importe ! Nous avons tous ce même espoir de titres, cette même envie de victoires, cette même soif du beau jeu.
Salle Léopold GOULOUMES : le berceau !
1969.
Avant…je ne me souviens pas.
Trop jeune !
Et voilà donc le marmot, accompagné par son basketteur de père qui va voir son premier match de basket de haut niveau !
Première impression. Pas simple d’arriver dans la salle Gouloumes. Le stationnement déjà pose problème ! Totalement imbriquée dans un quartier d’habitations, sans parking prévu pour accueillir de nombreux véhicules, il faut soit, arriver de bonne heure, soit sillonner les rues adjacentes pour trouver une place….et marcher.
Devant la salle, beaucoup de monde ! A tel point que les automobilistes non-avertis des horaires de match sont parfois bloqués par une file de piétons attendant de franchir les quelques marches permettant d’atteindre les guichets.
2 guichets. Pas plus ! Un à gauche et un à droite ! Pas de réservation ailleurs qu’à la salle et les grands soirs, lorsque les plus précautionneux des supporters avaient pris les devants et achetés leurs places à l’avance…plus rien ! Je me souviens encore d’avoir la boule au ventre en espérant ne pas arriver devant le guichet pour entendre dire que c’est complet ! (ça nous est arrivé… et l’enfant que j’étais vivait le retour en voiture et les 35 kms comme une véritable catastrophe).
Il faut se serrer dans la file d’attente, se pencher pour acheter le fameux sésame. 3 catégories de places sont proposées. Sur les gradins latéraux, les plus chères, le luxe ! Sur des chaises métalliques disposées au fond de la salle derrière le panneau (où les poteaux ne permettent qu’une vue partielle du terrain) … Ou... Au balcon où 3 rangs sont disponibles de part et d’autre sur la longueur du terrain et derrière le panneau d’entrée, en contrebas du tableau de marque (dont la lecture devient alors impossible).
Les soirs d’affluence, si on n’a pas acheté à l’avance….on prend ce qui reste ! Bien heureux encore d’avoir une place.
On entre. On se faufile. On atteint presque immédiatement le parquet. On cherche sa place. On se serre contre son voisin d’un soir.
Un mot suffit à qualifier cette impression : promiscuité.
Quand on est sur les meilleures places, il faut avoir des fesses larges et ne pas souffrir du dos. Les 3 barres qui composent les gradins sont disjointes. L’inconfort est total. Pas de dossier. Les genoux du voisin supérieur dans le dos. Les vôtres dans ceux du voisin du dessous. On s’installe et on ne bouge plus !
Au balcon. Au premier rang on a les genoux dans le mur mais on peut se pencher au-dessus de la barre de sécurité Au 3ème…il vaut mieux être debout pour voir quelque chose en s’appuyant sur le mur et en se penchant pour essayer de voir ce qui se passe en contrebas. Et puis la chaleur… Une fournaise. La condensation qui se dépose sur les publicités peintes sur les murs…
Mais l’ambiance…. !!!
Inoubliable !!!
Une proximité avec les joueurs, avec le jeu, absolument totale. On entend tout. Les rebonds du ballon sur le parquet. Les tirs qui s’écrasent sur un plexiglass qui absorbe tout. Les crissements de semelles des joueurs. Leurs appels, les consignes données par les meneurs. Les coups de sifflets des arbitres amplifiés par la résonnance du lieu.
Pour peu on pourrait faire tomber les arbitres d’un croche pied tant leur marge de déplacement entre la ligne et le premier rang de spectateurs est courte. Le jeu…on en est acteurs. Les mauvaises passes arrivent directement dans les rangs de spectateurs. Il faut faire attention. Ça peut faire mal un ballon de basket ! Parfois, plus drôle, ce sont les joueurs qui, en cherchant à éviter une sortie de balle, finissent sur les genoux des premiers rangs. Régulièrement, les arbitres « montent » à la table de marque, surélevée, pour expliciter une sanction, vérifier un score.
On n’assiste pas à un match lorsque l’on vient à Gouloumès. On le vit ! On est acteur du match…
A la mi-temps, les joueurs se faufilent entre les spectateurs de l’entrée pour pouvoir atteindre les vestiaires.
De l’autre côté on ouvre les portes métalliques pour avoir un peu d’air frais… C’est le temps de la Gitane maïs ou de la Gauloise bleue aussi !
Et les joueurs me direz-vous ?
Pour moi, du haut de mes 9 ans, des êtres exceptionnels, forcément !
Les BALTZER, MONNET, CORDEVANT, CONTER, SCHNEIDER, PETER, GOISBAULT, AUDUREAU étaient des combattants ! Des sortes de spartiates des temps modernes !
Venus pour la plupart à l’initiative du président GASNAL, ils travaillaient souvent aux Comptoirs Modernes, un groupe de distribution alimentaire d’une réelle renommée dans ces temps où les grandes surfaces commençaient à fleurir.
Le Moderne de SCM vient d’ailleurs de là. Mais cette histoire vous la trouverez ailleurs….
PETER, CORDEVANT, SCHNEIDER, AUDUREAU, CONTER, MONNET et BALTZER (si je ne me trompe pas !)
Mais mon regard d’enfant se pose surtout sur 2 autres joueurs. Eux, ils sont le rêve absolu, le mythe du basket américain qui prend vie au Mans, sous mes yeux !
Art KENNEY et Jay HARRINGTON
Le premier et le troisième américain du SCM (HARRINGTON a remplacé un certain DENZER arrivé l’année précédente avec KENNEY).
L’un est pivot. L’autre meneur. L’un est roux, l’autre brun. Mais tous deux sont pour moi simplement magiques !
Art KENNEY, ici sous le maillot du Simmenthal MILAN qu’il rejoindra après 2 ans au SCM pour 3 saisons….avant de revenir au Mans…mais à la Rotonde !
Eux, ils vont enflammer mes rêves ! KENNEY par sa combativité ! 2m04 de muscles, pas un gros jump, mais un sens du placement, une capacité à provoquer les fautes, un battant au rebond comme je n’en ai pas vu beaucoup ensuite. HARRINGTON, c’est LE meneur US par excellence. Beau manieur de balle, adroit, vif, incisif. Il formait avec BALTZER un duo presqu’incongru tant les 2 joueurs étaient aux antipodes l’un de l’autre. HARRINGTON maîtrisait le jump shoot. BALTZER prenait ses tirs extérieurs les pieds solidement ancrés au sol. HARRINGTON dribblait beaucoup. BALTZER cherchait la bonne passe ou l’espace permettant d’atteindre le cercle ou de provoquer la faute qui, lorsqu’elle était suivie de lancers francs, l’amenait à lancer son ballon à 2 mains en balancier depuis l’entre jambes !
C’est à GOULOUMES aussi que j’ai vu passer quelques-unes des « légendes » du basket de l’époque. Jacques CACHEMIRE et Jean-Claude BONATO (le père de Yann…aux bras roulés directement inspirés de JABBAR) pour ANTIBES, Charles TASSIN pour CAEN, Jean DEGROS et Jean-Pierre STAELENS pour DENAIN (avec un « trou » toulousain en 1969 pour Staelens), Rudy BENNETT et Larry ROBERTSON les deux perles américaines de VICHY et, bien évidemment Alain GILLES et l’ASVEL (qui empochera le titre cette année-là.
Photo un peu plus tardive. On est ici à la Rotonde. KENNEY était revenu de MILAN et BENNETT évoluait sous les couleurs de l’ASVEL. En arrière-plan, Bob PURKHISER qui cache en partie Eric BEUGNOT.
Mais ce SCM-là était une vraie équipe ! La base de ce qui cimentera le club pour le conduire, dans une autre salle vers un destin glorieux !
Quant à Gouloumes….. J’y suis retourné souvent après mes années jeunesse comme joueur, comme entraîneur, comme arbitre. C’était toujours un plaisir de rentrer dans cette salle qui, avec le temps avait vieilli. On trouvait, forcément, beaucoup plus de confort dans les gymnases modernes (notamment au niveau de la température intérieure)… On ne pouvait plus gravir les marches pour accéder aux balcons… Le bruit du ballon, des semelles étaient toujours là… Mais il manquait ce public, cette chaleur, cette moiteur que seuls mes souvenirs peuvent encore vous transmettre.
La salle est morte. Son plancher a été vendu, comme une relique d’un temps ancien où au Mans, un club dénommé SCM avait su se faire une place parmi les grands.
[justify]De Gouloumes, il me reste aujourd’hui une nostalgie. Un parfum que l’on retrouve encore un peu dans ces patros manceaux de la JALT ou de St PAVIN… Un parfum qui laissera sans doute un peu orphelins toutes celles et ceux qui ont vécu au rythme des matchs qui s’y sont déroulés.